The Cloisters 

et

l’Art de la Mémoire

 

 

Pour Mary Carruthers, « le cloître (est) une machine mnémonique et une encyclopédie. » Nous avons vu que la tenture de La Chasse à la licorne, bien postérieure à l’apparition des abbayes, a joué le même rôle pour aider à la mémorisation des événements présentés dans une série de sept tapisseries à la mission encyclopédique.

 

Depuis l'édification de celui de l'abbaye de Lorsch au IXe siècle, le cloître constitue une machine mnémonique. Sa structure mnémonique atteint la perfection grâce à son plan carré, ses galeries abritées, l’espace régulier entre les colonnes, ses chapiteaux à hauteur du regard et l’éclairage naturel. Mary Carruthers note : « L'abbatiale médiévale n'est pas un cryptogramme, mais un instrument, une machine à penser qui fonctionne grâce à l'architecture et à l'ornementation ».

 

http://www.persee.fr/doc/ccmed_0007-9731_2004_num_47_186_2882_t1_0180_0000_1

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Abbaye_de_Lorsch

 

http://premontre.info/subpages/loci/imagines/imlorsch/gallorsch.htm

 

 

The Cloisters n’échappent pas à cette mission pour laquelle leurs concepteurs les ont édifiés et ont rassemblé toutes les œuvres d’art qui y sont exposées. Chaque cloître reconstitué, chaque salle, illustre un thème : les planètes, les divinités gréco-romaines… dont la symbolique franc-maçonne est friande.

 

 

« Dans une culture telle que le monachisme, on a peine à penser que l'appui à la memoria rerum que constitue le cloître ne compte pas au nombre des éléments qui font son succès en tant que forme. Au XIe siècle, le cloître s'impose comme le lieu même de la memoria méditative, l'espace privilégié de la lecture, de la prière et de l'instruction des novices. Bien entendu, le cloître est le « Paradis », bien entendu il est le jardin de l'Époux ; mais il est aussi, comme l'église, une machine de memoria complexe, dont les formes ont une efficace particulière pour la tâche de lecture. » (p. 339)

 

 

« Le plan de Saint-Gall est l'exemple le plus ancien qui subsiste aujourd'hui de pictura architecturale, outil mnémonique dont il est couramment fait usage, et de façon souvent complexe, dans la littérature médiévale tardive, mais qui trouve son origine dans les écrits de l'Église primitive.

 

Le plan de Saint-Gall est fondamentalement une machine à
méditer : en lui-même d'abord, puis en tant qu'il matérialise un ensemble de structures qui sont elles-mêmes des machines à méditer, notamment les parties du monastère strictement réservées aux moines. Après le XI
e siècle, nombre de principes qui avaient fait de l'architecture et des manuscrits de bons outils cognitifs furent étendus, moyennant adaptation, à un public beaucoup plus vaste de clercs et de laïcs, mais à l'époque du plan de Saint-Gall, on ne leur supposait d'autres utilisateurs que les moines. » (p. 288)

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Plan_de_Saint-Gall

 

 

Une « sorte » de bâtiment : Grégoire le Grand et le Temple d'Échiel

 

« Pour les moines du XIIe siècle, l'expression la plus courante de l'avatar du Tabernacle – Temple est, outre la description de l'Exode, celle de la citadelle de la vision d'Ézéchiel. À l'instar du Tabernacle, la citadelle fait l'objet d'une description détaillée, dans laquelle sont mentionnés divers plans de construction dont les « mesures » complexes furent interprétées et par Jérôme, et par Grégoire le Grand. »

 

La vision d’Ézéchiel : Ezéchiel, chapitre 40

http://www.bible-en-ligne.net/bible,26O-40,ezechiel.php

 

Le Tabernacle : Exode, de 36:8 à 39:43

http://www.bible-en-ligne.net/bible,02O-36,exode.php

 

Le Temple de Jérusalem :

Premier Livre des Rois, chapitres 6 à 8

http://www.bible-en-ligne.net/bible,11O-6,1-rois.php

 

et Deuxième livre des Chroniques, chapitres 3 à 5

http://www.bible-en-ligne.net/bible,14O-3,2-chroniques.php

 

 

« Il faut garder présente à l'esprit l'idée que l'utilisation rhétorique, dans la communauté monastique, d'un dispositif architectural comme outil mnémonique n'est pas une invention du XIIe siècle. Il y est déjà fait allusion dans Cassien. Dans la dixième Conférence, l'abbé Isaac, outre qu'il recommande l'usage d'un verset des Psaumes (le premier du Psaume 69) comme instrument de méditation, utilise aussi un système de loci architecturaux dérivé de l'Exode. Décrivant les différents stades de l'éducation d'un moine à la prière, Isaac dit à Germain et aux autres novices que, dans la mesure où ils ont désormais franchi « la porte de la vraie prière », il lui appartient de les « introduire sans beaucoup de peine du vestibule [ ... ] jusqu'au fond du sanctuaire ». Il conseille aussi à Germain de graver le verset « in adiutorium meum intende », « sur les murs de [sa] maison et dans le sanctuaire de [son] cœur ».

 

« Les bâtiments comme machines à méditer

 

J'aimerais montrer de quelle manière on a pu faire des bâtiments conventuels eux-mêmes, ― notamment de l'oratoire (templum) et du cloître (pratum) ― les supports et les conduits rhétoriques de la memoria méditative et liturgique. Nous avons vu comment, dans le monachisme primitif, les bâtiments bibliques en particulier le Tabernacle et le Temple avaient pu servir de supports mentaux à la prière (dont il ne faut jamais oublier qu'elle est l'activité qui englobe toutes les autres). Nous avons vu aussi quelle association étroite existe entre le trope de la pictura (indépendamment du fait que le mot lui-même signifie plus généralement « schème» ou dispositio) et les diagrammes et procédés cartographiques utilisés, pendant tout le Moyen Âge, pour décrire le travail de la cognition.

 

L'« orientation » architecturale de ces techniques la préférence affichée pour les bâtiments fictifs édifiés sur la foi des descriptions bibliques, le soin particulier (mais non exclusif) porté à l'ornementation des murs et des plafonds, tâche traditionnellement dévolue aux architecti ― a produit un trope de composition dont on s'est servi aussi pour fabriquer des bâtiments réels et concevoir des programmes de décoration murale.

 

Vers 1246, le grand théologien dominicain Albert le Grand composa un traité sur les vertus intitulé De bono. Abordant la question de la Prudence, Albert commenta l'art de la mémoire décrit dans la

Rhetorica ad Herennium. Pour son public universitaire, Albert  reprit la liste des sites architecturaux donnés comme exemples de loci mnémoniques la niche, la maison, la voûte, la colonnade et la traduisit en langage du XIIIe siècle : templum (l'abbatiale), hospitalis (l'hospice), pratum (le jardin du cloître) et intercolumnia, un terme directement issu des sources antiques mais désignant ici

intercolumnia le plus courant, c'est-à-dire le portique, le déambulatoire, les collatéraux et les galeries du cloître. Chacune de ces structures, remarquons-le, est de type monastique : pour Albert le Grand et son public, les monastères étaient, à l'évidence, les « lieux » les mieux désignés pour le travail de la mémoire.

 

 

Dès le début de sa réforme, Bernard de Clairvaux fit savoir que les filiales de son abbaye devaient être construites à l'identique de Clairvaux, dès lors que la chose était matériellement possible. On a parfois interprété cette volonté comme une tentative d'imposer l'uniformité aux Cisterciens, voire comme la première expression d'une réforme centralisatrice, autoritariste, de l'Église occidentale de l'époque, mais je crois qu'on peut aussi faire valoir une autre interprétation. Comme tous les fondateurs d'ordres monastiques, Bernard avait d'abord le souci de doter ses frères d'un support qui fût approprié à la vie contemplative. J'utilise ici le mot « support » dans un sens technique, comme on dit de la pierre, du papier, du bois ou du parchemin qu'ils servent de support à l'écriture ou à la peinture. L'architecture fournit un support à l'intérieur duquel la memoria peut opérer dans la tâche liturgique, pour la communauté, et dans la lecture silencieuse ou à voix haute, pour l'individu. » (p. 318-319)

 

– Mary CARRUTHERS, Machina Memorialis, Méditation, rhétorique et fabrication des images au moyen âge, traduit de l'anglais par Fabienne Durand-Bogaert,Gallimard, 1998 et 2002. [The Craft of Thought: Meditation, Rhetoric, and the Making of Images, 400-1200, Cambridge University Press, 1998].

 

–  Frances YATES, The Art of Memory (Pimlico 1966) (traduction en français de Daniel Arasse, L’Art de la mémoire, Gallimard, 1975)

 

– Bruno ROY, Paul ZUMTHOR dir., Jeux de mémoire. Aspects de la mnémotechnie médiévale, Presses universitaires de Montréal / Paris, Vrin, 1985.

–  François BOUTONNET, Mnémosyne - Une histoire des arts de la mémoire de l'Antiquité à la création multimédia contemporaine, Disvoir, 2013.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Art_de_m%C3%A9moire

 

 

 

 

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